POUR
La qualité de la compression d'une façon générale, le nombre d'options, le design
CONTRE
Le mode "Milan" dont le son manque un peu d'épaisseur même s'il offre une tonalité intéressante
Si vous lisez régulièrement les tests que je publie sur Projet Home Studio, vous connaissez sans doute la série Gems de la marque italienne Overloud.
J’ai en effet déjà rédigé un certain nombre de reviews concernant leurs plugins tels que l’EQ84, le très efficace CompG ou encore le simulateur de bande magnétique Tapedesk.
Comp670 est, à l’heure où j’écris ces lignes, le dernier né de la série.
Et comme son nom l’indique, il s’agit d’une simulation du très célèbre compresseur analogique Fairchild 670… qui pour la petite histoire coûte désormais entre 40 000 et 50 000 euros, là où le plugin d’Overloud n’en coûte que 129.
Autrement dit, ce type de plugin est à peu près le seul moyen d’avoir un Fairchild dans votre studio (je dis bien “ce type”, car il existe quelques autres simulations sur le marché).
Regardons plus en détail ce dont il s’agit, et comment ça sonne…
Un peu d’histoire
Début des années 50.
Rein Narma, ingénieur du son américain d’origine estonienne qui avait précédemment construit des consoles de mixage pour des personnes comme Les Paul, conçoit un compresseur mono-canal.
Embauché rapidement comme ingénieur en chef par la Fairchild Equiment Corporation, il accepte que son compresseur soit produit par la marque.
Le Fairchild 660 est né.
Il est utilisé notamment pour protéger les machines de découpe des disques vinyles, mais également comme limiteur pour la radio.
En 1959, Narma met au point un nouveau modèle, le Fairchild 670, qui dispose désormais de deux canaux et peut donc fonctionner en stereo ou en mid/side.
La bête contient pas moins de 20 lampes et 11 transformateurs, pour un point total de 30 kg et une taille de rack de 6U !
Aujourd’hui, les Fairchild 670 sont très rares, n’ayant été fabriqués qu’en 1000 exemplaires — une quantité pourtant non-négligeable à l’époque. Mais ils n’en restent pas moins révérés comme d’excellents compresseurs de studio.
Interface et premières impressions
Au lancement du plugin, on est agréablement surpris par un design réaliste et très esthétique. L’ambiance old-school est assurée : la peinture et les boutons sont usés, comme s’ils avaient été utilisés durant de nombreuses années.
L’interface est séparée en deux parties :
- une partie supérieure, sur laquelle on va retrouver les réglages classiques des Fairchilds ;
- et une partie inférieure, comprenant principalement des réglages très utiles mais qui ne sont pas présents sur les modèles hardwares.
Partie supérieure
Au niveau de la partie supérieure se trouve tout d’abord un sélecteur à trois positions permettant de basculer entre les modèles simulés par le plugin : London, Los Angeles et Milan.
Concrètement, tous les Fairchild 670 sont différents : au fil du temps, à l’occasion de maintenances, certains de leurs composants ont été changés, voire les circuits modifiés. De fait, chaque modèle a sa propre tonalité.
Overloud a donc modélisé le comportement de trois d’entre eux pour nous proposer plus d’options sonores.
A l’utilisation, le modèle “Milan” semble un peu moins intéressant dans la mesure où le son apparaît comme manquant de corps, du moins dans certains cas. Les deux autres simulations, toutefois, sont beaucoup plus faciles à utiliser :
Ensuite, on retrouve bien entendu des réglages de niveau d’entrée (input gain) et de seuil de compression (threshold).
Le comportement de Comp670 n’étant absolument pas linéaire, je ne pourrai que vous conseiller de tester différentes combinaisons, en vous appuyant au besoin sur les vu-mètres qui font très bien leur travail.
Le curseur AGC permet quant à lui de sélectionner le mode de fonctionnement du plugin qui peut être en Mid/side ou en Stereo (pur ou dual mono).
Enfin, et c’est peut-être le point le plus important, il y a aussi le réglage des constantes de temps (time constant), qui influe sur l’attaque et le release du compresseur.
Le manuel est très peu précis sur ce point, mais après vérification auprès d’Overloud, voici la signification des différents réglages (identiques à ceux présents sur les Fairchild) :
Position du Curseur | Attaque (ms) | Release (s) |
1 | 0,2 | 0,3 |
2 | 0,2 | 0,8 |
3 | 0,4 | 2 |
4 | 0,8 | 5 |
5 | 0,4 | 2 pour les crêtes 10 pour des crêtes successives |
6 | 0,2 | 0,3 pour les crêtes 10 pour des crêtes successives 25 en fonction du niveau d’entrée |
Partie inférieure
Sur la partie basse du plugin, on retrouve tout d’abord deux petits trimmers :
- DC Threshold — qui permet d’ajuster le facteur Knee du compresseur ;
- Harm — qui permet de contrôler la quantité d’harmoniques (essayez de le pousser à fond, et apparaît une distorsion plutôt agréable).
A ceci s’ajoute un double réglage de niveau de sortie : le premier agit juste après la compression comme Make-Up Gain, tandis que le dernier arrive en fin de chaîne de traitement (donc je pense après les simulations de transformateurs de sortie).
Enfin, de façon plus classique, on retrouve les habituelles options de filtre side-chain (0-500 Hz) et de mixage en parallèle.
Un monstre de caractère…
…mais qu’il faut apprendre à dompter.
A l’utilisation, Comp670 est plus difficile à utiliser qu’il n’y paraît initialement.
Certes, l’attaque rapide mais non extrême du plugin permet d’éviter assez facilement des effets de pumping indésirables.
Mais il faut tout de même prendre le temps de bien écouter la façon dont le compresseur colore le signal et tout simplement apprendre à l’utiliser.
Attention : il ne s’agit pas d’une critique, mais simplement du fait que contrôler un Fairchild 670 pour obtenir le son que l’on souhaite est plus complexe que, par exemple, un 1176.
Au-delà des trois modes London / Los Angeles / Milan mentionnés plus haut, Comp670 est un compresseur/limiteur de qualité offrant une coloration très forte, vintage.
Que vous l’utilisiez à l’échelle de vos pistes individuelles ou bien d’un buss complet, vous ne pourrez que constater le caractère très agréable du plugin. A noter d’ailleurs que la simulation analogique n’influe pas que sur la dynamique du signal, mais aussi sur les harmoniques et sur l’équilibre des fréquences.
Prenons un premier exemple avec un buss de batterie (sortant tout droit de Superior Drummer), en faisant varier la quantité d’harmoniques générées par le plugin :
Comme vous pouvez l’entendre, la coloration apportée au son est très forte : le compresseur génère une grande quantité d’harmoniques, mais il affecte également le son en faisant ressortir agréablement les ghost notes de la caisse claire et la charleston.
Sur les buss et ou le master buss, Comp670 a bien sûr complètement sa place pour lisser le son et capter certaines crêtes. Même avec des réglages engendrant une réduction de gain faible, de l’ordre de 1 ou 2 dB, le plugin offre un son extrêmement intéressant.
Toutefois, il excelle également sur des pistes individuelles.
Je pense tout particulièrement aux pistes de voix.
Ecoutez plutôt ce que Comp670 apporte sur cette piste de chant extraite du morceau “Believe” du groupe I Am Cassettes. En particulier, faites attention :
- à la capacité du compresseur de lisser le volume de la piste de voix ;
- et aux différentes couleurs apportées par chacune des trois simulations de 670 (notez par exemple le soulèvement des aigus avec la version Milan).
En conclusion
Vous l’aurez compris, j’imagine, après avoir lu les paragraphes ci-dessus : Comp670 est pour moi un excellent plugin.
C’est en effet une vraie occasion, même si d’autres simulations existent, d’avoir accès à ce type de son, à ce type de compression dans votre studio ou home studio sans dépenser plusieurs dizaines de milliers d’euros.
En vous appuyant sur les trois simulations incluses dans le plugin, et si vous prenez le temps de le maîtriser comme il se doit, vous pourrez apporter énormément de couleur et de cohésion à vos mix, d’une façon bien différente de la plupart des autres compresseurs disponibles sur le marché.
Ce n’est pas un hasard, il faut le dire, si le Fairchild 670 a été utilisé pour la plupart des pistes de voix des Beatles à partir de leur album Revolver de 1966…
Bravo à Overloud pour ce très beau plugin ! 🙂